#37
MAI -JUIN 2014
Couverture nationale
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L'ÉDITO
Et mon cul, tu l’as vu ? Et pourtant il existe ! » Ainsi parlait Kir face à celui qui osait mettre en doute l’existence de Dieu. Homme de foi et de paradoxe, le chanoine était doué d’un sens marketing à faire pâlir d’envie un publiciste des Trente Glorieuses. Son produit à vendre, c’était lui. Il le mettait en scène. Il lui fabriquait une image sur mesure, jusqu’à la moindre trace de terre sur sa soutane, jusqu’à la moindre répartie en séance de conseil municipal. En noir et blanc, Kir jouait sur les contrastes, sans nuance mais avec un culot du diable.
Le chanoine de Bèze, c’est dans le titre, donna de l’amour à tout va, pour le show. Natif d’Alise-Sainte-Reine, symbole de la défaite gauloise, il fut le premier à présider l’Assemblée nationale sous la Ve République. Indissociable du noir spirituel, c’est avec le blanc et le cassis spiritueux qu’il inventa l’apéro le plus populaire de sa génération. Kir avait de la gueule et une grande gueule comme on en fait plus depuis Audiard. Il se promenait avec une DS, comme De Gaulle, mais n’avait pas une grande affection pour le général. Il inventa le « double K » pour Nikita Khrouchtchev alors que l’Eglise, son église, invitait au boycott d’une Russie malveillante pour les catholiques.
Mais Kir s’en fichait. Sa vie aura été une comédie dramatique écrite dans le vif du sujet. Sollicité en juin 1940 pour pallier les manquements d’un maire de Dijon défaillant, il permet à 5 000 prisonniers de guerre français de fuir le camp de Longvic. Arrêté, relâché, persécuté par les collabos il est finalement blessé de plusieurs balles dans un attentat conduit par la Gestapo. Puis en 46, élu jusqu’à la fin de ses jours à la mairie de Dijon.
Et là, commence le grand cirque. Kir avec une casquette faisant la circulation ; Kir menaçant de prendre les commandes d’un bulldozer si son projet de lac n’avance pas ; Kir plus ingénieur hydraulique qu’un ingénieur hydraulique ; Kir sur tous les fronts, le verbe haut, saluant la foule, droit debout, présidentiel dans son bateau inaugural en juin 1964. Seul à bord, ou presque. D’ailleurs, on se demande encore qui sont les trois individus assis à l’arrière. On se demande qui pouvait avoir le droit d’être à l’ombre du chanoine, en ce jour si officiel qu’aucun ministre n’y fut convié. Et si pour les 50 « berges » du lac Kir, on en faisait un jeu ?
”
Dominique Bruillot
AU SOMMAIRE
Théâtral et atypique, le chanoine Kir reste à jamais associé à l’histoire de Dijon, mais aussi d’un apéritif et d’un lac qui portent son nom. Rarement un personnage public n’aura autant bousculé les codes au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Visionnaire agaçant, grande gueule aussi humaniste que totalitaire, homme d’église peu orthodoxe, Félix Kir a imposé son style avec un certain culot sous sa soutane légendaire. Royal et sans tabous.
Empreintes humaines traduisant un besoin croissant de matériaux pour la construction (d’autoroutes en particulier), les gravières sont de plus en plus nombreuses à retrouver une seconde vie. Par la main de l’homme à nouveau, ces carrières de granulats se transforment en réserves naturelles ou en bassins de baignade. Illustration en Pays beaunois, un territoire exemplaire en la matière.
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